mardi 9 avril 2019

La Bouche d'un revolver ou les pieds de la Croix - nouvelle de Clément Gouty





Une journée de plus écoulée. Ou une de moins. Ça dépend dans quel sens on regarde. 24 heures de moins vers l'issue fatale et inévitable de toute vie. Une journée de plus sur le seuil du mensonge, à grimacer sur les tréteaux de la grande comédie humaine. J'avais choisi d'y être figurant pour me donner bonne conscience : moins de dialogues, moins de simagrées. Mais ça ne changeait rien en vérité, l'essentiel étant de participer comme le disait Coubertin.
A quoi avais-je consumé ma vie ? A laisser passer des chances, à courir après des trains...
Au milieu des aigreurs terminales, et des prostitutions multiformes, je voulais garder la fraîcheur d'une pucelle en écoutant les jérémiades et en épongeant les larmes sincères. Peine perdue.
Il fallait en finir avec ces ombres.
Le spleen n'est plus à la mode, avait clamé la chanteuse. Les armes à feu, elles, le redevenaient.
J'avais un ami gendarme. Il s'entraînait au tir dans un stand privé, en dehors de son service. De quoi me donner des envies.
Se jeter du toit du monde ou mettre le feu à sa cervelle ? 
J'avais pensé aussi au monastère pour une sortie en douceur...
Les monastères sauveront le monde... Ils sont inutiles à ses yeux, permettent d'en sortir sans effusion de sang... Rendre déjà à Dieu la vie qu'il nous a donné, sans détruire son cadeau. Mais nous étions au temps du jetable, de l'obsolescence programmée. Pas question de réparer une  machine défectueuse,  il fallait la mettre à la casse. Euthanasier les vieux, avorter les handicapés, et en finir avec le désespoir dans des éclats hollywoodiens. Mourir, pas gémir. Gémir, pas prier. Ne pas se faire prier, et quitter la scène les armes à la main. Les retourner contre soi. Il ne fallait pas haïr l'autre, mais la haine de soi était permise. J'étais mon propre exutoire. 
Oserais-je être ringard? Il fallait pour cela plus de courage que pour se faire sauter la cervelle. Nager à contre-courant dans les eaux du Sheol; pas donné à tout le monde. 
Mais il y avait le grégorien. Et la beauté sauvera le monde, disait Dostoïevski.
Et elle m'a sauvé. Désormais j'attends d'être rappelé par mon créateur en patientant au fil des heures, en chantant avec les autres. J'ai repris le combat, j'ai osé le 'Oui' je suis rentré à l'abbaye.


Biographie

Mon prénom, Clément,  fut celui de nombreux papes.  Mon nom, Gouty, est d'origine latine. Je suis trois fois romain, gallo-romain par ma race, gréco -romain par ma culture et catholique romain par ma foi. Rien d'étonnant alors à ce que mes premiers textes publiés sur ce blog aient pour thème Rome, la ville éternelle. Dans mes autres textes , on pourra parfois entrevoir aussi des lueurs d'éternité, car pour moi l'écriture est liée à la mort. Sinon , pourquoi noter ? on pourrait se contenter de parler…






1 commentaire:

  1. Le style est fluide, mais je trouve l'histoire triste.Et pourquoi cette recherche de la pureté ? L'être humain n'est pas pur.

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Adieu collines - poème d'Estelle Sciortino

Dans de grands champs de visions, je chassais l'élan Sûre qu'un jour, mon nom se pendrait à l'horizon Je me disais...